Pour Louis Dumoulin, directeur de Nuances d’Avenir, il est grand temps que la droite s’approprie les sujets environnementaux. L'écologie n'appartient pas à la gauche !
L'idée selon laquelle la lutte contre le changement climatique appartiendrait exclusivement aux mouvements de gauche est tenace et soutenue par une présence médiatique et politique quasi exclusive des personnalités de cette sphère de l'échiquier politique français.
Les milieux plus conservateurs, quant à eux, ont pour la plupart choisi de se mettre en retrait et d'en faire une thématique secondaire, privilégiant des sujets a priori plus en phase avec leur électorat : sécurité, identité, souveraineté… Ces choix politiques ont participé à coller sur les sympathisants de droite l'étiquette de citoyens désintéressés de la cause climatique.
POSITION CARICATURALE
Aujourd’hui, de nouvelles enquêtes viennent bousculer ces préjugés : les sympathisants de droite sont tout aussi préoccupés et dans l’attente d’un écologisme conservateur. C’est ce que montre une note réalisée par l’institut Kantar Publics, commandée par Nuances d’avenir et Parlons climat. 75 % des sympathisants de droite se disent inquiets du changement climatique ; 64 % des électeurs de droite considèrent que le modèle économique actuel n’est pas compatible avec la préservation de l’environnement et la lutte contre le changement climatique ; 73 % considèrent que la sobriété est une solution souhaitable.
Les preuves sont là : le peuple de droite, à rebours des clichés, est prêt à agir. Problème : ce n’est pas toujours le cas de leurs représentants. En décembre, Guillaume Peltier, ancien député Les Républicains ayant désormais rejoint les rangs d’Éric Zemmour (Reconquête !), déclarait : « Je suis blanc, je suis chrétien, je suis hétérosexuel. Je vis dans la France rurale. Je roule au diesel et je me chauffe au fioul. Et pour tout ça, je n’ai aucune intention de demander pardon. »
Cette déclaration est symptomatique d’une position caricaturale parfois adoptée à droite. Une position en rejet de l’écologie politique sans, à aucun moment, proposer de vision alternative, de solutions en phase avec les défis contemporains. Dans les partis de droite plus modérés, le constat est similaire : trouver des personnalités de premier plan qui s’emparent sérieusement du sujet reste compliqué. Pas impossible, mais compliqué…
OUVRIR LE SPECTRE
Si la polarisation est grande, la gauche aussi a sa part de responsabilité. À travers ses positions et alliances, les mouvements de gauche ont fourni un certain nombre de munitions à la droite pour faire du climat une question d’identité politique.
La proximité historique du seul parti revendiqué écologiste (EELV) avec la gauche a participé à créer ce fossé en offrant une vision unique des solutions à mettre en place. Le développement d’un narratif pessimiste et culpabilisateur n’a pas aidé. Bien sûr qu’individuellement nous avons un rôle à jouer et que les responsabilités sont partagées, mais la peur et la culpabilisation sont-elles le meilleur moyen de mobiliser et d’inciter à l’action ? La règle n’est-elle pas d’adapter le message aux valeurs et attentes des différentes audiences ?
POSTURES ET AMALGAMES DE PART ET D’AUTRE ONT PARTICIPÉ À FAIRE DU CLIMAT UN SUJET POLARISANT
Ne nous méprenons pas : la gauche et le mouvement climat ont massivement participé à l’éveil des consciences sur la question climatique. Ces propos ne remettent pas en cause leur action et leur engagement. Cependant, il est désormais nécessaire d’ouvrir le spectre et de créer les conditions pour que tous puissent s’appliquer à proposer des moyens de lutter contre le changement climatique. Postures et amalgames de part et d’autre ont participé à faire du climat un sujet polarisant.
ÉCOLOGISME CONSERVATEUR
Pourquoi un dialogue au niveau sociétal et représentatif de tous serait impossible dès lors que les constats des changements en cours sont partagés ? C’est l’espoir de nouvelles organisations comme Écologie responsable, un jeune think tank conservateur qui croit à une écologie positive conciliant préservation, progrès social et économie verte.
Leur dernière démonstration de force, le 6 juin 2023 à Paris, a rassemblé près de 200 participants issus de cercles de droite. Ils se sont réunis afin d’échanger sur l’écologie de droite comme une nécessité pour renaître. Think tanks, citoyens, et élus, dont Antoine Vermorel-Marques, Aurélien Pradié et Florence Portelli, ont pu échanger sur une nouvelle proposition et l’émergence d’un écologisme conservateur. Ferréol Delmas, directeur général d’Écologie responsable, est convaincu qu’il est urgent de créer cette alternative :
« La jeunesse de droite et du centre attend avec impatience l’avènement d’un grand courant vert de droite. »
Il y a aujourd’hui une opportunité pour le centre et la droite de se réapproprier les sujets environnementaux et de sortir des postures stériles et d’une opposition aveugle. Mais cette opportunité ne pourra être saisie que si les décideurs s’engagent en répondant aux attentes de leur électorat pour un écologisme conservateur et ancré dans leurs valeurs.